Le syndicat d’apiculture du Rhône a reçu Jos GUTH en invité d’honneur de son assemblée générale le 24 janvier 2015 à l’école vétérinaire VETAGRO’SUP.
Textes de Jos GUTH et d’Emmanuelle BOUGRELLE
Schémas et photos de Jos GUTH
Jos GUTH, apiculteur professionnel luxembourgeois est connu pour être un des meilleurs éleveurs de reines d’Europe pour la sélection et la multiplication des abeilles.
Et sa conférence, devant un amphithéâtre plein d’apiculteurs petits producteurs, pluriactifs et professionnels, était exceptionnelle par son haut niveau technique, exceptionnelle grâce à cette volonté de partage d’expériences et de connaissances apicoles et enfin exceptionnelle par l’ambiance animée qui régnait dans la salle, en bref un conférencier hors pair !
« À chaque fois que la pratique ne confirme pas l’hypothèse avancée, il faut remettre en cause son opinion ».
Jos GUTH présente de nombreuses techniques apicoles qui sont le fruit d’échanges entre apiculteurs et d’essais suivis d’observations attentives des colonies et cela dans le but d’obtenir des abeilles en quantité correcte dans la ruche et surtout des abeilles en bonne santé.
Soutien de la thermorégulation dans la colonie
Jos GUTH travaille beaucoup sur la régulation de la température dans la ruche et sur les avantages que la colonie peut retirer d’une bonne isolation de la ruche. Les planchers grillagés doivent être fermés à partir du nourrissement hivernal et ouvert à partir de l’occupation de la première hausse et du plancher.
On peut aussi améliorer l’isolation de la ruche par le toit en intercalant deux baguettes sur le couvre-cadre de façon à ce que le toit ne soit pas en contact avec le couvre-cadre. Le liteau entre le toit et le couvre-cadre permet une meilleure ventilation contre l’humidité.
Des partitions isolantes peuvent être placées en rive de façon systématique en fin de saison et lors de la reprise du couvain au printemps (Dadant 10 et 12 cadres).
Les corps en plastique Nicot-Plast peuvent être garnis de microbilles de polystyrène afin d’éviter la formation de condensation à l’intérieur et d’augmenter le pouvoir isolant des parois.
Partitions isolantes et toit ventilé
Les ruches et essaims affaiblis par une reine défaillante, remérage raté, empoisonnement, varroas … doivent être soutenus en resserrant les cadres et en ajoutant les abeilles de 2 à 4 Miniplus en fin de saison.
Le résultat d’un micro climat agréable dans la ruche sera un développement harmonieux et régulier de la colonie, des économies de provisions et une plus grande longévité des abeilles élevées dans la chaleur.
L’abeille hygiénique
Jos GUTH, nous présente les tests mis en place avec Paul JUNGELS et le groupement des Goulettes (Belgique) pour détecter les colonies et souches d’abeilles nettoyeuses.
Test hygiénique sur couvain d’abeille
Pour rappel, il s’agit de comptabiliser le nombre de cellules de couvain operculé et tué, qu’une colonie nettoie en 24 heures. En élevage, le choix de multiplier des colonies ayant un caractère hygiénique donc de « bonnes nettoyeuses » permet d’avoir des abeilles plus résistantes aux maladies du couvain.
Ces tests hygiéniques présentés par Jos GUTH sont réalisés, soit par la méthode de congélation à l’azote liquide, soit par un brûleur piezo sur 100 cellules.
Test simplifié : emploi d’un bruleur
Sur l’exploitation de Paul Jungles et d’Annette Guth, les colonies d’élevage sont soumises au test hygiénique.
SMR abeille hygiénique VSH
La sélection d’une abeille résistante au varroa est un moyen à court et à long terme de lutte contre ce parasite. En effet, c’est donner aux populations d’abeilles les moyens de s’adapter et de résister à ce parasite en cherchant à connaître et à reconnaître les comportements de défense contre le varroa.
Jeff HARRIS et John HARBO ont d’abord sélectionné puis travaillé sur l’abeille SMR (sensitive of mite reproduction), qui présentait un comportement limitant la reproduction du varroa dans la colonie.
Marla SPIVAK qui étudie le comportement hygiénique du couvain, observe que les abeilles SMR ont un comportement très fortement hygiénique.
Les abeilles VSH sont des abeilles fortement hygiéniques, capables de détecter les cellules infestées de varroas avec progéniture et qui ne s’occupent pas des nymphes infestées par des varroas non fertiles. A la suite de ces découvertes, les chercheurs ont proposé une nouvelle appellation VSH (Varroa Sensitive Hygienic) pour l’abeille SMR.
L’observation de l’élimination des varroas fertiles par l’abeille VSH montre que la période de nettoyage se termine au 17e jour après la ponte de la reine.
On désopercule des cellules jusqu’à avoir trouvé 30 cellules infestées. La cotation des abeilles VSH se fera en calculant le pourcentage de varroas qui ne se sont pas reproduits, et n’ont donc pas de descendance par rapport aux cellules infestées avec des descendants.
La fondation « Arista Bee Research » a été créée par Bartian Fernhout et Renaud Lavend’Homme à la fin 2013 et qui a pour but l’élevage d’abeilles plus saines et surtout résistantes au Varroa. La fondation est une organisation sans but lucratif, soutenue scientifiquement par les chercheurs du « United States Department of Agriculture » (USDA, Baton Rouge, USA), le « Bieneninstitut Kirchhain » (Allemagne), le « Länderinstitut für Bienenkunde, Hohen Neuendorf » (Allemagne) et la « Wageningen Universiteit » (Pays-Bas) et plusieurs spécialistes européens.
Après une étape d’infestation artificielle supplémentaire par du varroa, on a compté dans le couvain de ces colonies le pourcentage de varroas non-reproductifs, ce qui est le test de référence afin de déterminer le niveau de résistance dû au VSH. Au total, plus de 20 colonies ont été identifiées comme possédant un haut niveau VSH (75% à 100% VSH). La moitié de ces colonies étaient d’origine européenne pure ce qui prouve que le comportement de résistance VSH se trouve également dans notre population d’abeilles européennes, et qu’il pourra être porté à des niveaux élevés en peu de temps grâce à l’utilisation de l’insémination avec un seul mâle.
La production professionnelle d’essaims
Pour l’apiculteur qu’il soit professionnel ou amateur, la production d’essaims présente plusieurs intérêts : une source de revenu, la garantie de la survie de l’exploitation et le remplacement des unités défaillantes. Pour une exploitation et en dehors des colonies en production, Jos GUTH multiplie 10 essaims en partant d’un seul ! Le principe est de profiter de la dynamique de développement d’un essaim et un soutien soutenu de nourrissement.
La production d’essaim démarre vers le 15 avril avec des essaims hivernés très populeux.
Une première division est faite selon la méthode utilisant un deuxième corps d’extension (voir ci-dessus) et après 15 à 20 jours, ce deuxième corps étant rempli de couvain peut être divisé en deux en répartissant les cadres de couvain dans 2 ruchettes (voir ci-dessous).
Chaque opération est complétée par un nourrissement de 3 à 4 litres de sirop dilué pour permettre à l’essaim de tirer les cires et de se développer car le sirop dilué à 20% incite la reine à la ponte.
Ces essaims sont déplacés vers la station de fécondation et une cellule royale est introduite avec protection plastique, au centre du couvain.
Un contrôle de la ponte est effectué 12 à 15 jours après.
Les reines sont ensuite clippées et marquées. Cet essaim sera nourrit.
3 à 4 semaines après le début de la ponte, ces essaims se sont développés dans toute la ruchette et une seconde division peut alors avoir lieu.
Ces opérations de production d’essaims peuvent avoir lieu 3 semaines après le début de la ponte suivant le même schéma jusqu’à fin juillet.
La dernière opération de division se fait avec le corps d’extension comme le corps, la reine de l’essaim reste avec juste un cadre de couvain. Les 5 autres cadres de couvain (ensemble 11 cadres) sont répartis en 3 ou 4 essaims.
Derniers essaims fin juillet
Autre stratégie vis-à-vis du varroa
Jos GUTH nous présente les travaux d’encagement des reines dans le protocole de traitement anti varroa. L’encagement des reines permet un arrêt de reproduction du varroa dans le couvain et une meilleure efficacité des traitements en l’absence de couvain.
Encagement de la reine sur une surface de ponte réduite
Conseils de Jos GUTH : Hivernage
Le nourrissement d’automne se fait en 2 ou 3 prises de sirop non dilué pour inciter au stockage, mise en place de bloc de chaleur.
Batterie de ruchettes en hivernage
Conseils de Jos GUTH : Limitation de l’essaimage
Paul JUNGELS et Jos GUTH préconise une adaptation génétique en favorisant des souches d’abeilles peu essaimeuses dans son élevage. Lors d’année de forte pression, on est mieux paré avec des ruches permettant un essaimage dirigé. Pour l’agrandir, les cadres de cire gaufrée doivent être placés en bordure du nid à couvain, les abeilles lors du printemps doivent avoir la place pour se développer (cadres de cire gaufrée et hausses), extraction du premier miel de printemps avant cristallisation, clippage des reines et changement des reines après 2 années de production.
Remerciements
Nous remercions Jos GUTH ainsi que tous ses collègues apiculteurs avec lesquels il travaille avec passion, pour tous ces précieux conseils. À chacun de mettre en pratique ces techniques, de faire ses propres essais (et essaims !) afin d’adapter sa façon de suivre ses colonies d’abeilles en fonction de ses objectifs mais en améliorant sa pratique apicole. Chacun aura, dès le printemps, quand l’activité des ruchers aura recommencé et battra son plein, le souvenir des ruches de Jos GUTH débordantes d’abeilles !
Bravo et merci !
Et en prime, un cadeau de Jos : Tableau de gestion de la production d’essaims
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